si j’admirais l’habileté des artisans, des architectes et des orfèvres, c’était pour une raison plus subtile et moins évidente. En vérité, j’aime et j’admire tout ce que l’esprit humain crée pour permettre à nos demeures de ressembler à la nature. L’or des feuillages d’automne, le bistre des labours, le blanc de la neige, les bleus, infiniment variés du ciel nous sont dérobés par les murs ; nous en sommes privés par le couvert des toits, l’obstacle des volets de bois, le rideau des clôtures. L’art est le seul moyen de restituer à notre décor confiné ces richesses gratuites dont nous sommes coupés.
Jean-Christophe Rufin, Le Grand Coeur. Ed Gallimard 2012